Coach expérimentée et entrepreneure, Héloïse Blain intervient dans de nombreuses entreprises auprès de personnes en situation de handicap, de leurs managers ou de leurs collaborateurs. Elle revient avec nous sur les spécificité de ces accompagnements. Elle contribue activement et bénévolement à la Nuit du handicap, une première en France le 9 juin 2018 à Boulogne-Billancourt et dans 20 villes de France.
Dans quel cadre intervenez-vous avec la casquette « handicap »?
Sans jeu de mots sur le terme handicap qui a une origine anglosaxonne « Hand-in-Cap » ?
Les entreprises et organisations publiques font appel à moi dans le cadre de coaching auprès de personnes en situation de handicap ou non, de leurs collaborateurs ou de leurs managers. Ce type de coaching particulièrement délicat requiert tout autant une forte compréhension humaine qu’une connaissance pointue du monde du travail. Les coaching impliquant de près ou de loin une personne touchée par le handicap sont d’autant plus sensibles qu’ils touchent l’humain dans sa profondeur, son intimité, sa zone de stabilité et de confiance intérieure.
J’interviens uniquement auprès de personnes qui sont aptes au travail et pour laquelle l’organisation fait le choix d’investir dans le présent et de miser sur leur avenir. Je n’ai donc ni une approche d’adaptation du poste de travail ou curative comme d’autres spécialistes (ergonome, psychothérapeute, médecine du travail, médecin traitant, etc.) Lors de ces coaching, il est régulièrement question d’intégration ou de maintien dans l’emploi. Ces questions ne sont pas spécifiques à la problématique du handicap mais elle prennent, dans ce type d’accompagnement, une résonance particulière. Si les enjeux sont similaires, on est souvent devant des personnalités différentes, qui se sont souvent battues pour s’en sortir et font preuve d’une résilience impressionnante. Le plus grand point commun entre les coaching « simple » et ceux qui abordent la question du handicap est que les entreprises misent sur le potentiel de la personne au travail. Si certaines personnes concernées doutent de leurs compétences ou de leurs capacités, ce n’est pas le cas de leur managers et les ressources humaines qui, sinon, choisirait d’autres leviers d’investissement.
Quelles sont les spécificités de ce type d’accompagnement ?
Lorsque j’interviens auprès d’une personne en situation de handicap, je remarque souvent l’importance de la résilience, de la résistance et de l’adaptation dans la personnalité des coachés. Dans bien des cas, les personnes ont du faire face à une situation traumatique (un accident, une maladie, une souffrance psychique). Ce sont des périodes de vie dans lesquelles elles ont dû se battre pour survivre ou pour maintenir un style de vie. Ce sont des histoires qui ont contraint les personnes à s’adapter entièrement notamment en s’adaptant, en compensant, en déviant même leur personnalité. On rentre dans l’humain en profondeur : l’objectif est alors de savoir retrouver la personne qu’on était sans oublier celle que l’on est devenue.
Outre une ouverture particulière à la question du handicap visible et surtout invisible, ce type de coaching demande d’avoir une connaissance fine des entreprises notamment parce qu’il est souvent question de performance : Comment maintenir ou améliorer ma propre performance ? Comment faire évoluer notre collaborateur ? Comment l’aider à performer dans la durée ?
Par ailleurs, même lorsque le sujet du handicap n’est pas présent au départ, ce type d’accompagnement m’a permis d’avoir l’oeil plus ouvert. Parfois ce sujet peut ressortir longtemps après le début d’un coaching ou même être ignoré par la personne concernée. Beaucoup de personnes l’ignorent et ne se considèrent ni « handicapées » ni « malades » alors qu’elles sont dans une situation qui requiert une adaptation particulière. Je suis toujours très vigilante à ne rien projeter mais à garder l’esprit vigilant et critique. Pour travailler avec tact et compréhension, il est alors nécessaire d’avoir une expérience spécifique. C’est aussi pour cela que je suis très attentive à la régularité et à la sélection de mes propres superviseurs seniors. J’ai 2 lieux de supervision qui se complètent : l’un me permet d’approfondir la démarche et la posture de coach professionnel avec des superviseurs très seniors. L’autre lieu me permet de voir toutes les zones d’ombres & de lumière avec un médecin psychiatre.
Quels exemples vous ont particulièrement marqués ?
Trois personnes me viennent immédiatement en tête : trois rencontres aussi extra-ordinaires que leurs parcours de vie.
La première est une conseillère clientèle qui s’est un jour écroulée dans sa cuisine à cause d’un AVC ayant engendré une hémiplégie. L’objectif de ce coaching était de lui permettre de développer des relations plus sereines avec son équipe. En effet, à la suite de sont AVC, cette personne avait dû se battre pour s’en sortir et regagner son autonomie en repartant presque de zéro. Elle a fortement compensé pour avoir la force nécessaire pour regravir les échelons de l’autonomie. Elle en est sorti avec une forme d’intolérance face aux failles des autres personnes qui rendait plus complexes ses relations avec ses collaborateurs. Les personnes confrontées au handicap ont développé une force admirable, une résilience étonnante mais pas à n’importe quel prix. Pour rester à son poste et sécuriser son avenir professionnel, elle devait comprendre et accepter son fonctionnement.
Le deuxième exemple qui me vient en tête est un chargé de projets en développement informatique. A cause de l’évolution d’une maladie dégénérative de la vision diagnostiquée lorsqu’il était jeune adulte, il devait remettre en question ses manières de travailler. Il avait développer une autre forme d’intelligence sensorielle et sociale mais fournissait de nombreux efforts d’adaptation. Il n’était pas conscient des talents qu’ils avaient développé, notamment un repérage dans l’espace exceptionnel. Ce coaching fait réaliser à quel point le décalage peut être fort : entre les croyances limitantes, les perceptions et la réalité. L’adaptation nécessaire au dépassement de soi à créer des nouvelles compétences, connaissances qui sont souvent méconnues par les personnes alors qu’elles sont vues par les entreprises.
Enfin, j’ai travaillé auprès d’un directeur de projets qui a connu un burn-out avec des séquelles assimilées à un handicap (comme un cancer, un diabète, le sida, etc.) L’enjeu principal de cet accompagnement était de lui permettre de maintenir sa performance à long terme, tout en préservant sa qualité de vie. De plus, il n’avait plus le goût au travail, ni de goût vraiment aux évènements et relations dans sa sphère personnelle. Grâce au travail qu’il a mené sur lui-même lors de nos séances de coaching, il a pu retrouver fierté, dignité et occuper sa place au travail, tout en tissant des liens humains : il a recommencé à déjeuner avec ses collaborateurs, à faire des pauses café et à « prendre du plaisir au travail ». Le coaching, une clef pour le label « Great place to work » ?
Ces trois exemples montrent une infime partie de la diversité des approches et de l’unicité des parcours de vie (accident, maladie, déni de soi). Dans ces accompagnements, on touche aux extrêmes d’un enjeu de coaching professionnel, de la même manière que l’on peut le faire dans l’accompagnement des dirigeants des grandes entreprises du CAC 40 : pour moi, cela demande le même « charisme » en coaching. Les extrêmes du coaching me passionnent et je sais, de par mon parcours personnel et professionnel, que j’y ai toute ma place !
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